Du bleu au blé

Pierre

Chroniques d’un apprenti boulanger : semaine 1

Mardi 2 septembre, 2 heures 30 : Ça y est l’alarme de mon téléphone se déclenche, je me lève, à la fois fatigué et excité de commencer ce stage en boulangerie. Les chats se réveillent aussi, Lana (en photo) se dit qu’il est l’heure de jouer, de courir, grimper, sauter… moi qui voulais un peu de quiétude et de calme avant d’attaquer cette première longue journée… Je me fais couler un café, même deux. Je débute ce stage à 3h30, jusqu’à 8h30. En temps normal j’enchainerai avec ma journée classique de travail de 9h à 18h, mais aujourd’hui je suis décalé de 13h à 21h. Les cafés avalés, la toilette effectuée et les gamelles des chats remplies je pars vers mon lieu de stage dans la nuit noire, personne dans les rues, c’est calme, j’adore ! Arrivé sur place après un trajet en trottinette d’environ 5 minutes, la lumière s’échappe déjà du fournil. Quelqu’un est déjà à l’intérieur.J’entre, et je fais la connaissance d’E., le pâtissier (mais aussi confiseur, chocolatier et glacier) que je n’avais encore jamais vu. Cinquantenaire, plein d’expérience et super sympa.  Je me change, pantalon de boulanger blanc, chaussures de sécurité, ça y est on est dedans ! PF., le boulanger arrive un peu plus tard, c’est donc avec E. que je vais passer ma première « journée ». Je découvre le matériel professionnel, la balance, les ustensiles, les matières premières. Tout est plus grand, plus gros, un peu comme quand on arrive dans un supermarché américain, les plaquettes de beurre à 25kg, les dizaines de boites de 30 œufs, les sacs de farine de 25kg. Je commence par sortir les culs de poule, ils sont trois fois plus grands que ceux que j’ai à la maison. E. me met aux pesées et me montre comment préparer des cookies. Beurre, sucre, farine, chocolat, noisettes que des bons ingrédients !Ça me permet également de me familiariser avec un des batteurs/pétrins, à côté de lui mon kitchenAid ne fait pas le poids. Et je parle même pas du pétrin avec la capacité de 50kg de farine, on pourrait presque entrer dedans.Les pâtes à cookie prêtes et reposées, il est l’heure de les bouler. J’en rempli trois plaques entières, certains seront cuits aujourd’hui, d’autres une prochaine fois et réservés au frais. E. va ensuite faire de la pâte levée qui est utilisée pour tout un tas de recettes. Il me montre comment il enchâsse le beurre dans la pâte (appelée détrempe pour les intimes) et m’explique l’utilisation du laminoir.Ça faisait un moment que je voulais tester le laminoir, je ne sais pas pourquoi mais cette machine m’a toujours fasciné. Au final je m’en faisais tout un monde mais la prise en main est assez rapide, un bouton de chaque côté, un bouton d’urgence rouge sur le dessus, des grilles qui se relèvent et arrêtent la machine et une manivelle pour jouer sur l’épaisseur voulue en modifiant la hauteur des rouleaux. E.  abaisse la pâte, c’est rapide et fluide. Un peu plus laborieux pour moi mais je finis par prendre le pli… même si par excès de confiance la pâte a failli se retrouver au sol (c’est le soucis quand on veut aller aussi vite que son professeur sans avoir sa dextérité).PF., le boulanger, est arrivé entre temps pour préparer toute la gamme des pains proposés dans la boulangerie. Tout y est fait maison, contrairement à certaines boulangeries se faisant livrer par des sociétés pour les pâtisseries ou viennoiseries. J’ai aussi fait la connaissance du préparateur des snacks salés, R., Sri Lankais, dont la barrière de la langue n’affecte en rien son sourire. Ainsi se termine cette première « partie » de journée en tant que stagiaire boulanger/pâtissier. Le temps pour moi de faire une petite pause, de rentrer chez moi, aller faire 10km de course le long de la Seine avec mon frère et d’enfiler mes habits de policier pour attaquer cette seconde « partie »… qui se terminera dans un appartement à déplacer un corps sans vie aux côtés d’un médecin légiste. Dur retour à la réalité. Vendredi 5 septembre, 2 heures 30 : deuxième jour en tant que stagiaire, réveil toujours à la même heure, même routine. Un peu moins d’appréhension que mardi, mes affaires sont restées sur place, les connaissances ont déjà été faites, les premiers échanges ont déjà eu lieu. Sur place, E. est déjà au four et au moulin, il prépare de la crème pâtissière. La dernière fois que j’en avais fait, le lait avait brûlé au fond de la casserole faisant alors apparaitre des petits bouts noirs de cramé. La sienne est nickel. Il me donne la recette de la crème d’amande, je détaille le beurre, le sucre mais surtout je casse des œufs… beaucoup d’œufs… 60. Moi qui suis pourtant un grand consommateur, je peux vous affirmer que j’en avais jamais cassé autant en si peu de temps ! On s’en rend pas forcément compte mais c’est un nombre incalculable de saladier, de culs de poule et de bacs qu’on utilise, et rien que pour les pesées. Tout ça, il faut également le nettoyer et le récurer ! Faire la plonge prend du temps. Petite pause, le temps de boire un petit café et je continue la journée avec PF. le boulanger, il m’explique sa façon de travailler, ses méthodes de fermentation et de façonnage. C’est là que je me rends compte que ce soit en pâtisserie ou en boulangerie, tout est une question d’organisation. Il faut toujours avoir quelque chose de lancer, une fermentation, une pesée, un pétrissage. C’est la clef. C’est donc pour ça qu’on nous fait faire un organigramme au CAP avec plusieurs préparations en même temps, même si ça reste loin de ce qu’il se passe en entreprise c’est tout de même un avant goût. Les pâtes ici sont très hydratées, les manipuler nécessite un vrai savoir faire. Il me montre comment diviser la pâte à tradition qui a pointé en masse au froid toute la nuit pour développer ses arômes, puis comment façonner les

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Changement de vie : le point de départ

Depuis ma formation à l’école de Police, j’ai appris. Sur moi. Sur les autres. Sur la société. J’ai croisé des centaines de visages, travaillé dans plusieurs services, traversé des situations parfois dures, parfois belles. Un quotidien riche. Un travail intéressant. Un salaire correct. De bons collègues. Du temps libre. Bref : tout pour être bien Mais il me manquait quelque chose. Une idée me trottait dans la tête. Un besoin de concret. Un désir de changement. Construire quelque chose de mes mains. Passer de l’imaginaire à la réalité n’est pas simple. Recommencer à zéro à 35 ans l’est encore moins. C’est un saut dans l’inconnu, une remise en question, l’acceptation du risque… et de l’échec possible. Mais au fond, est-ce que ce n’est pas ça, « vivre » ? Trop de personnes se contentent d’exister. De rester dans une routine rassurante, même si elle est insatisfaisante. C’st un faux sentiment de sécurité. 2025 est mon point de départ. Pourquoi la boulangerie ? Grand fan de pizza napolitaine, ce qui m’a amené à acheter un pétrin, un four puis des bouquins. Et petit à petit je suis tombé dans l’univers de la panification. Puis j’ai découvert la boulangerie : ses techniques, son savoir-faire. Ça aurait pu rester un simple passe-temps. Mais un soir, 23h30, iPad à la main, je tombe sur une vidéo : Un boulanger japonais, formé en France, qui travaille la nuit entière pour que ses pains et viennoiseries soient prêts à l’aube. J’ai trouvé ça inspirant. Noble. Et surtout, je me suis dit « Pourquoi pas moi ? » À partir de là, cette idée me revenait sans cesse : au travail, pendant mes séances de sport. J’en ai parlé avec mes proches. J’ai pesé le pour et le contre. Et j’ai décidé de sauter le pas. Parce qu’à trop réfléchir, on reste immobile. Seul le mouvement crée le changement. C’est ainsi qu’en 2025, j’ai choisi de me lancer. De suivre mon instinct. Et de m’inscrire au CAP Boulanger à distance. De tenter ce nouveau départ, de faire ce pari risqué et de débuter une nouvelle aventure.

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